Sortie en librairie le 21 mai 2010 de "Voyage au pays des Ouïghours" de Sylvie Lasserre aux Editions Cartouche.
« Nous vivons dans un immense camp de concentration à ciel ouvert ! » C’est armée de cette phrase de la célèbre dissidente Rebiya Kadeer que Sylvie Lasserre gagne le Turkestan chinois, le pays des Ouïghours. En reportage avec un visa de tourisme, d’Almaty, au Kazakhstan, à Urumqi en passant par Ghulja, puis d’Urumqi à Kachgar et Turfan, elle parcourt près de 6 000 km en train, en taxi collectif, en triporteur pour se heurter à… un mur de silence.
Un constat : la colonisation han progresse à vive allure jusqu’aux confins de l’Asie centrale. Les rêves d’indépendance ne sont jamais très loin, mais partout l’on se tait. Turkestan – pire « Ouïghouristan » – est un mot qui conduit directement en prison. Pékin a instauré un régime de terreur, les espions sont partout. Une culture millénaire est menacée de disparition et ne laissera bientôt place qu’à un folklore fossilisé pour touristes.
Tout au long de son voyage, Sylvie Lasserre est frappée par l’absence de sourires, la tristesse des visages, si gais d’habitude en Asie centrale. Au Turkestan chinois, la joie s’en est allée. Beaucoup rêvent de partir à l’étranger : « Ici nous n’avons aucun avenir. » Mais les passeports des Ouïghours ont été confisqués. Autre fait marquant : l’ignorance dans laquelle Pékin maintient ce peuple, par un contrôle efficace des médias. « Tout ce que l’on sait, c’est par vous, les étrangers, qu’on l’apprend. »
Partie en quête de témoignages et de faits précis, l’auteur, qui a le plus grand mal à délier les langues, poursuit ses recherches sur les traditions et l’histoire : sur les traces du premier royaume ouïghour à Kara Balgassoun, située dans l’actuelle Mongolie, puis des momies du Taklamakan vieilles de quatre millénaires, au cirque du célèbre funambule Adil Hoshur, en passant par la maison d’un chamane qui n’a plus le droit d’exercer, sans oublier, à Kashgar, le fameux samâ – ronde des hommes au lendemain de la fin du ramadan – et le quartier transformé en « Ouïghourland », ainsi que les mausolées des saints soufis de la région… Mais partout, ce sera le silence. Le reste, elle l’approfondira en Occident à son retour.
À l’issue de ce voyage, le choix entre journalisme et militantisme s’avère difficile. À la suite des événements sanglants de l’été 2009 survenus à Urumqi, Sylvie Lasserre opte pour le militantisme, mettant en veille son activité professionnelle pour une dizaine de mois afin de mieux se consacrer à ce peuple oublié du reste du monde. Au point que Rebiya Kadeer, qu’elle rencontre à plusieurs reprises, lui propose d’occuper une fonction au sein du World Uyghur Congress.
L’auteur
Sylvie Lasserre est reporter, éditrice et photographe, passionnée par l’Asie centrale et les peuples turciques. Elle est l’auteur d’une soixantaine d’articles et reportages sur l’Asie centrale principalement, dont une vingtaine sur les Ouïghours, de reportages radio (Radio Suisse Romande) et de plusieurs expositions photographiques. Née à Meknès au Maroc, docteur en physique diplomée de la Faculté des sciences d’Orsay et du Politecnico de Milan, elle abandonne en 2004 la carrière d’ingénieur qu’elle mène depuis treize ans pour se consacrer au journalisme, ce qui l’amène à collaborer avec la presse française et internationale (Le Monde 2, Le Soir, Le Temps, Die Welt, La Stampa, Courrier international, Elle, Marie Claire international, L’Actualité, L’Hebdo, Cosmopolitan, La Presse, Le Monde, Libération, L’Express Mag, Internazionale, The Guardian…).
En 2008, elle devient membre de la Société asiatique et, l’année suivante, à la suite des événements survenus au Xinjiang, se détourne temporairement du journalisme pour se consacrer à la cause ouïghoure et lancer les Éditions d’Asie centrale. Elle anime le blog « Sur les routes d’Asie centrale » et dirige la Maison d’Asie centrale, une association destinée à promouvoir la culture centrasiatique en France, notamment grâce à l’organisation d’événements culturels.
Sylvie Lasserre, qui a vécu en France, Italie et en Belgique, et parle six langues, partage aujourd’hui son temps entre la France, l’Asie centrale et la Turquie.
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